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La Chine

vendredi 5 janvier 2007, par JCR-RED

La Chine, nouvelle super puissance économique ?
Privas (Jussieu), 24/07/2005

Retours sur la révolution chinoise, l’origine du parti communiste chinois et le système économique et politique

Pour comprendre le fonctionnement de la Chine aujourd’hui, il faut revenir en arrière, sur son histoire. La révolution chinoise a eu lieu après une longue période de colonisation par les occidentaux et les japonais. L’économie a été structurée par cette colonisation : l’Est est relativement moderne (ports, industries…) tandis que le reste est à un stade moyenâgeux. Le deuxième élément structurant est la destruction physique de la classe ouvrière pendant l’échec de la première révolution chinoise par la Kuomintang (parti nationaliste bourgeois).
La révolution chinoise victorieuse de 1949 s’appui sur les campagnes, en même temps qu’elle est une guerre de libération nationale contre les occupations étrangères (occidentaux, japonais). Le parti communiste chinois s’appui sur les campagnes (il organise une réforme agraire dans les zones qu’il occupe militairement pendant la guerre et la révolution). Il s’appuie aussi sur son armée (c’est pour cela que l’armée a un tel poids en Chine aujourd’hui). Le PCC est en rupture avec l’URSS. En effet, celle-ci avait négocié pendant les accords de Yalta avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne que la Chine fasse partie de la sphère d’influence occidentale. Elle s’oppose donc à la révolution chinoise, que la PCC conduit tout de même.
Le PCC est au moment de la prise du pouvoir un parti déjà bureaucratique et avec une base ouvrière faible.

La rupture de 1978

Mao Zédong meurt en 1976. Dans cette période, la Chine fait face à des difficultés économiques insurmontables. Deng Xiaoping (nouveau dirigeant) et l’appareil du parti se tournent vers un pragmatisme total. Il s’agit d’une nouvelle politique économique, en partie à l’image de celle qui a eu lieu en URSS en 1921, mais à une échelle bien plus importante, sur une durée illimitée et dans une situation différente.
On peut la résumer par les éléments suivants :
  Privatisations
  Renforcement du pouvoir des bureaucraties locales et de la petite propriété
  Transfert de richesses des campagnes vers les villes (d’abord en nourriture)
  Concurrence sur le marché intérieur (entre les ethnies, appauvrissement des campagnes, chômage dans les campagnes qui provoque un exode rural contrôlé avec une main de fer, tout cela provoquant des salaires très faibles)
  Ouverture de régions et de villes (Shanghai…) au capital étranger
La main d’œuvre bon marché permet une « remontée des filière » : à partir d’une économie moyenâgeuse, on produit à des prix défiants toute concurrence dans un domaine, puis on s’élargie à une production techniquement plus avancée, puis à une autre.
L’Etat soumet l’ensemble du pays au développement industriel : en surexploitant les campagnes, en opprimant les nations minoritaires (pour réduire l’instabilité, il envoie des chinois habiter dans ces zones, ce qui revient à des colonies de peuplement, où on écrase le peuple opprimé).
La situation est différente de la NEP russe de 1921. D’abord économiquement, puisque la façon dans les maoïstes ont mené la guerre a provoqué des collectivisations des terres à grande échelle, et des communes populaires. Ensuite politiquement, car le PCC a un contrôle sur la société bien plus fort, y compris par une répression intense. La bureaucratie parvient pour ces raisons à maintenir le cap de cette politique, ce qui était impossible en URSS.

L’économie chinoise aujourd’hui

Le processus économique mis en branle en 1978 ne s’est pas arrêté, au contraire, il se renforce :
  L’introduction de capital étranger se renforce, essentiellement dans la manufacture. D’abord, cette introduction se faisant avec un majorité du capital dans les mains de l’Etat mais, depuis 2005, il est possible qu’un actionnaire étranger soit majoritaire dans quelques entreprises, ce qui est présenté comme un test pour ensuite étendre les parts des capitaux privés. Dans ces introductions de capitaux, l’Etat impose toujours un échange de technologies, c’est-à-dire que les entreprises étrangères doivent fournir de nouvelles techniques à la Chine. Aujourd’hui, deux tiers des entreprises appartiennent intégralement à l’Etat, le reste étant soit mixte entre l’Etat et des entreprises privées.
  Les échanges avec l’étranger sont de plus en plus importants, sous « monopole du commerce extérieur » (il n’y a que l’Etat qui organise des échanges économiques avec l’extérieur). Ces échanges se font par des portes : Taiwan, Hong-Kong, Singapour…
  Les privatisations sont en partie des transferts de capitaux de l’Etat dans les mains individuelles des bureaucrates du PCC et même dans les mains du PCC lui-même
  Le parti communiste chinois a modifié ses statuts : être capitaliste fait maintenant partie des critères qui permettent d’en faire partie !
  Contrairement aux apparences, la crise économique qui a touché l’Asie en 1997 n’a pas été sans conséquence sur la Chine. En particulier, elle contribue à rendre difficile la vente des actions des entreprises chinoises, qui ont du mal à trouver des acheteurs.
Cette politique est clairement une longue marche, commencée des années plus tôt, vers l’intégration au marché capitaliste et à la création d’une classe bourgeoise possédant les richesses.

La Chine dans le monde

L’idéologie maoïste est issue de guerres de libération nationale, dans un pays qui est attaqué de tous les côtés depuis des centaines d’années. Cela a deux conséquences : la protection contre l’étranger est une priorité, et l’idéologie anti-impérialiste est très forte dans la population. De plus, la taille du pays fait que l’organisation du marché intérieur est la priorité sur l’extension. C’est pour tout cela que la Chine ne tente jamais de participer à des conflits internationaux. La seule zone où elle se bat pour avoir une influence est l’Asie du Sud Est.
Tous ces facteurs, ainsi que la rupture avec l’URSS conduisent à une politique spécifique : la Chine s’oppose à l’URSS (y compris en étant parfois neutre face aux Etats-Unis), elle s’oppose aux Etats-Unis et au Japon (qui menacent sa sphère d’influence en Asie du Sud Est), elle tente de s’implanter militairement puis économiquement en Corée, au Vietnam. De plus, elle influence les partis communistes maoïstes qui existent surtout en Asie.
La Chine joue sur différents tableaux, elle n’engage pas de lutte frontale contre les grandes puissances, tout en n’ayant pas d’allié particulier.

Tentative de répondre à la question

1) Il existe une dépendance mutuelle entre la Chine et le capitalisme mondial. C’est un marché pour le Japon ou les Etats-Unis (pour les marchandises comme les capitaux), et inversement (la Chine importe et exporte énormément). La croissance chinoise (autour de 10% par an) permet de soutenir la maigre croissance mondiale. L’argent chinois est investi (cela fait partie d’accord entre les Etats-Unis et la Chine) dans des bons du trésor américains, qui financent donc la guerre en Irak, le soutien américain au Japon et à Taiwan…
2) Le discours anti-Chine en occident permet de soutenir l’industrie d’armement, permet de diviser les pays d’Asie entre eux, permet de faire pression sur le coût de la main-d’œuvre (cf. le chantage aux délocalisations, pourtant très minoritaires). En Chine, le discours anti-américain permet de renforcer l’unité nationale et de réduire la contestation. Mais la réalité est qu’on a un équilibre des forces, de forces qui ont besoin les unes des autres.
3) La marche vers le capitalisme se poursuit en Chine (intégration à l’Organisation mondiale du commerce, changement des statuts du PCC, transferts de propriétés…). Pour l’instant, cela ne provoque pas de crise interne ou mondiale car, pour l’occident, le modèle chinois a une grande stabilité et permet une exploitation gigantesque, tandis qu’en interne, la direction du PCC parvient a faire évoluer en douceur le pays.
La Chine a un potentiel économique gigantesque, en particulier vérifié par la croissance économique continue à 10% par an depuis des années. Cela vérifie aussi la supériorité d’économies planifiées sur les économies capitaliste anarchiques. Mais il y a de nombreuses incertitudes :
  Les introductions de capital étranger renforcent l’influence étrangère à l’intérieur du pays, ce qui menacera peut-être la direction du PCC. Qui sait si cela ne provoquera pas de changement de politique ?
  Une croissance à 10%, l’une des grandes forces actuelles de la Chine, n’est peut-être pas sans fin. Quelles seront alors les marges de manœuvre de l’Etat ?
  La situation économique, politique et sociale de la Chine provoque tout de même des crises internes. Il y a eu le massacre de la place Tian-An-Men en 1989, mais aussi actuellement des grèves ouvrières et des révoltes paysannes. Qui sait si les modifications dans la société chinoise ne vont pas permettre le redémarrage d’une activité politique autonome de la classe ouvrière ?

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