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« UNE Rà‰FORME QUI VOUS VEUT DU BIEN...  »

dimanche 30 décembre 2007, par Antoine

Le 23 avril 2002, alors que les manifestations contre Le Pen se succédaient, le conseil des Ministres du précédent gouvernement trouvait le temps de se réunir. A l’ordre du jour : l’application de la réforme ECTS des diplômes universitaires. Même en pleine tourmente, le gouvernement faisait son travail, c’est à dire qu’il mettait en place des attaques contre nous. Le gouvernement Raffarin ne s’y est pas trompé et a repris la réforme telle quelle : une véritable bombe pour le service public d’éducation.

Une réforme profondément inégalitaire. Avec les ECTS, la valeur des diplômes ne sera plus mesurée par le nombre d’années d’études, mais par le nombre de points (ou crédits) obtenus en ayant passé tel ou tel module. D’après le gouvernement, cela permettra d’harmoniser les diplômes au niveau européen. Le problème, c’est qu’au lieu d’élargir le cadre des diplômes (ce qui permettrait de trouver un travail partout en Europe par exemple), cette réforme régionnalise l’enseignement. Chaque université va pouvoir construire ses propres diplômes, avec des contenus et des conditions d’évaluation qui pourront être totalement différents. Il sera non seulement plus difficile de passer d’une fac à l’autre, mais les diplômes n’auront plus la même valeur sur le marché du travail ! En mettant directement les universités en concurrence entre elles, la réforme enclenche une logique infernale qui va entraîner la disparition de nombreuses filières dans certaines universités et qui risque de conduire à une situation où il faudra payer cher pour avoir droit à de bonnes études. Dans un pays comme l’Etat espagnol, où la réforme existe depuis plusieurs années, les universités font payer certains cours très cher... En cassant le cadre national des diplômes, les ECTS vont entraîner un développement massif des inégalités entre universités, filières mais également entre étudiants.

Les patrons se frottent les mains. La casse du cadre national des diplômes permet de resserrer les liens entre universités et entreprises. Plus précisément, les ECTS sont pour le patronat un prétexte pour adapter le contenu des diplômes à leurs besoins. A l’image des licences professionnelles, les diplômes prépareront les étudiants, par le biais de stages peu ou pas payés, à travailler pour une boîte précise, sur un poste de travail précis. Le problème d’une telle professionnalisation des études, c’est qu’avec ces diplômes, on trouvera du travail très rapidement, dans l’entreprise qui aura un accord avec la fac (le plus souvent ce sera la grande boîte du coin). Mais au bout de quelques temps, les besoins du marché auront évolué et le diplôme ne vaudra plus rien. Et à la première vague de licenciements, le diplôme ne permettra ni de retrouver un emploi dans l’immédiat ni d’en trouver un ailleurs (essayez de vous faire embaucher à Auchan avec un DEUG Total-Fina !). Plus grave, et c’est là que la concurrence entre étudiants jouera pleinement, les ECTS mettent en place l’« annexe descriptive au diplôme ». Seront indiqués sur votre diplôme l’endroit où vous l’avez passé, le nom de vos profs, l’intitulé de vos cours, vos notes, la session où vous avez obtenu vos modules, le nombre d’années pour obtenir le diplôme... Un patron aura accès à toutes ces informations, et pourra payer moins cher un salarié qu’un autre qui a poutant fait les mêmes études, mais qui n’aura pas forcément eu d’aussi bonnes notes, ou parce qu’il aura redoublé (ça arrive, quand on est obligé de bosser pour financer ses études...). Avec les ECTS, deux étudiants d’un même TD n’auront plus le même diplôme. C’est une attaque contre les qualifications, c’est à dire contre la garantie pour les étudiants qui ont fait les mêmes études qu’ils auront droit au même salaire et aux mêmes droits reconnus dans les conventions collectives. La professionnalisation et l’individualisation de la formation permettent d’attaquer frontalement les droits des travailleurs.

Qui veut la peau des ECTS ? Depuis la rentrée universitaires, plusieurs facs ont connu des mouvements de grève étudiante, notamment Toulouse et Bordeaux. Malheureusement ces grèves sont restée isolées, malgré les actions qui ont pu être menées un peu partout en France, surtout par l’UNEF. Mais le seul mot d’ordre qui pourra unifier les mobilisations dans les différentes facs, c’est l’abrogation des ECTS, c’est à dire leur suppression pure et simple. On ne peut ni combattre fac par fac, ni croire qu’il est possible d’améliorer une pareille contre-réforme. Dès la reprise des cours, tous ensemble contre la casse de nos diplômes, tous ensemble pour l’abrogation des ECTS !

Xavier, [Nanterre]

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