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CHRONIQUE DE LA GRàˆVE DES à‰TUDIANTS DE TOULOUSE-LE MIRAIL

dimanche 30 décembre 2007, par Antoine

Dès la rentrée universitaire, les syndicats étudiants (Aget, Sud, Unef) ont informé largement sur les réformes en cours dans l’enseignement supérieur et sur l’attaque menée contre le statut des MI/SE (surveillants). Un comité de lutte s’est créé et a mis à disposition des étudiants les textes de loi concernant les réformes. Le mouvement s’est donné la forme la plus démocratique possible : des assemblées générales (AG) ont été régulièrement convoquées afin que les décisions soient prises collectivement. Le comité de lutte applique les décisions de l’AG, il se partage en plusieurs commissions de travail. La première action du comité a eu lieu lors de l’inauguration du pôle E4 (Espace Etudiant Emploi Entreprise) à l’université de Toulouse-Rangueil, le 23 octobre. C’était pour nous une façon de condamner la logique de marchandisation du savoir et l’entrée des entreprises sur les campus (l’éducation est pour le MEDEF un marché juteux à conquérir).

Construction de la lutte. Lors de l’assemblée générale du mardi 5 novembre, la grève a été votée sur la base des revendications suivantes : non à la privatisation en cours de l’enseignement supérieur ; abrogation des ECTS et du système 3/5/8 ; maintien du cadre national des diplômes ; gratuité de l’enseignement ; maintien du statut et embauche massive des pions et aides-éducateurs ; construction de logements sociaux étudiants. Sur le plan local : non application des réformes ; inscription des 300 étudiants non-inscrits ; report des cours ayant lieu lors des jours de grève. Comme modalité d’action, l’AG a voté le déménagement de la fac. Dès le matin, les étudiants ont trouvé leurs salles de cours vidées de leurs tables et de leurs chaises. Les membres du comité de lutte étaient à l’entrée des UFR afin d’expliquer l’urgence de la mobilisation face aux attaques contre le service public d’éducation. Nous avons pris contact avec le personnel IATOSS et les enseignants, eux aussi touchés par les réductions du budget prévues par Lang et par Ferry (insuffisance du nombre des profs, précarisation accrue…).

En fin de semaine, nous avons envahi le rectorat à la suite d’une manifestation regroupant un millier de personnes (étudiants, lycéens et surveillants). Lors du conseil d’administration (CA) du mardi 12 novembre, les étudiants en lutte ont exposé leurs revendications et suite au refus du conseil de les adopter, l’administration a été occupée (de jour comme de nuit !). Des forums et des débats ont été organisés afin de confronter les points de vue sur les réformes et d’en expliquer les dangers.

La lutte se durcit. Mais les cours se tiennent toujours : les étudiants ne peuvent pas venir s’informer et il devient difficile aux grévistes de militer tout en rattrapant les cours… Le lundi 18 novembre, la grève ayant été reconduite, le comité de lutte met en place des piquets de grève : des barricades faites de tables et de chaises empêchent totalement l’accès aux salles de cours. Le mercredi, des assemblées d’UFR se tiennent afin d’étudier les conséquences concrètes qu’auraient les réformes dans chaque section (les savoirs rentables pour les entreprises sont privilégiés). Mais les syndicats enseignants majoritaires occultent le débat sur les réformes et se focalisent sur les modalités d’action du mouvement. Le mercredi après-midi, profitant du départ en manifestation des étudiants, le président de l’université utilise une minorité de profs et de IATOSS pour démonter les piquets de grève… Cette tentative de sabotage échoue car les piquets sont remontés le soir même par les grévistes.

Le lendemain, un CA exceptionnel adopte deux motions : le report de l’application des ECTS et du 3/5/8 ainsi que l’inscription des non-inscrits. C’est une première victoire… et la preuve que la lutte paie quand on est déterminé ! Le mardi 26 novembre, les étudiants se joignent à la manifestation nationale pour la défense de la fonction publique. Profitant de leur temps libre et de l’occupation de la fac, les grévistes organisent des cours alternatifs : sur la mondialisation avec Attac, sur le virilisme et le sexisme dans les mouvements sociaux, sur les médias, sur la Commune de Paris…

Vers un mouvement national ? Le 27 novembre, l’AG est appelée à la fois par les grévistes, les non grévistes et l’administration. Des enseignants prennent part au vote, ainsi que des militants de l’UNI (syndicat de droite) venus d’une autre fac… Les piquets de grève sont levés ; la grève, elle, est reconduite. Une coordination nationale se tient sur la fac du Mirail le week-end du 1er décembre, avec des étudiants de Limoges, Paris I (Tolbiac), Paris VI-VII (Jussieu), Pau, Bordeaux II et III, Aix-en-Provence, Albi : pour barrer la route aux réformes, un mouvement national est nécessaire.

Le mardi 3 décembre, une action est menée contre le quotidien régional La Dépêche, qui a réservé un traitement peu objectif au mouvement et n’avait publié aucun de nos droits de réponse. 150 étudiants occupent les locaux du journal et présentent aux responsables un article traitant de la grève et de ses raisons. Celui-ci une fois raccourci sera publié le lendemain. Le 6 décembre un sitting est organisé dans le bureau du président afin que les étudiants grévistes ne soient pas pénalisés pour leurs examens : tous les partiels sont reportés au-delà de deux semaines, par lettre officielle de l’administration.

La mobilisation se poursuit à l’extérieur de la fac. A l’appel des étudiants portugais et espagnols (qui sont confrontés aux mêmes problèmes, les réformes étant à l’échelle européenne), une manifestation est organisée à Toulouse, rassemblant 2000 étudiants. Tout au long de la semaine du 16 décembre, les cours alternatifs et forums se poursuivent à propos des systèmes universitaires anglais et américains, sur les questions de démocratie et du service public en présence de syndicalistes salariés (CGT, Sud). Un festival est organisé sur le campus avec des concerts sur deux jours, pour mettre en avant le côté festif de la lutte.

Lors de l’AG du jeudi 19 décembre, la grève n’est pas reconduite et l’administration est libérée après un mois et demi d’occupation. La lutte prendra d’autres formes dès la rentrée. Elle doit s’ancrer dans un mouvement de contestation national et européen contre cette logique libérale et pour la défense d’un véritable service public !

Correspondants JCR

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