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Violence à l’école

lundi 31 décembre 2007, par Antoine

Ces derniers temps, l’énorme tapage médiatique autour de la violence à l’école veut nous faire croire que c’est de pire en pire, qu’il faut plus de flics pour protéger les lycées, les collèges… Comme si c’était ça la solution ! Comme si le partenariat, éducation nationale / police (impulsé par Allègre) avait changé quelque chose. On ne parle que de cette violence des jeunes, mais l’Institution qu’est l’école, n’est-elle pas oppressive, n’est-elle pas violente ?

L’école n’est pas en marge de la société, elle en est le miroir. Les rivalités, la compétition, l’exclusion qui y existent sont reproduites à l’école puisqu’elle cherche à maintenir l’ordre établi. L’école ne peut amortir, désamorcer, neutraliser l’agitation, voire la violence par laquelle les jeunes répondent à la violence de leur relégation sociale. L’objectif de l’école n’est pas d’apprendre aux enfants à réfléchir, mais de les formater, faire d’eux de bons citoyens, imprégnés de morale, sachant faire la différence entre le bien et le mal. On veut leur transmettre des comportements et non plus un savoir qui pourrait leur donner des billes pour analyser, comprendre… On demande au système éducatif de jouer son rôle contre le chômage en inculquant aux jeunes les comportements qui les préparent à l’" insertion " et à l’" employabilité ". Pour cela, l’enseignement doit s’adapter aux besoins de l’économie. Lors d’une commission européenne, un groupe de réflexion sur l’éducation et la formation, explique : " les systèmes d’éducation ne sont pas assez conscients des contraintes de compétitivité " et de conclure " la demande réelle à laquelle est confronté le système éducatif est donc de jouer un rôle de filtre pour hiérarchiser les talents " Comme partout dans la société de marché, la concurrence doit devenir le moteur d’une nécessaire " émulation " capitaliste. Donc, l’école comme dispensatrice de connaissances serait réduite au minimum. Elle n’est pas là pour donner à chacun les moyens de s’épanouir mais elle est un instrument de sélection et de formatage qui est fonction des besoins fluctuants de la société capitaliste.

Il est vrai que l’accès à l’école s’est généralisé depuis quarante ans. Néanmoins, cette entrée massive de toutes les catégories sociales ne signifie pas pour autant une " démocratisation ". Cela suppose non seulement l’accès de tous à l’école, de la maternelle à l’université, mais surtout l’accès de tous aux savoirs, quelque soit l’origine sociale et culturelle. Si l’on compare les chances d’accès aux différents niveaux de scolarisation des enfants d’ouvriers à celle des enfants de cadres, les inégalités sont non seulement très importantes mais elles progressent avec l’élévation du niveau observé (il suffit de compter le nombre d’enfants d’ouvriers en classe prépa ! !). L’école reproduit les classes sociales présentes dans la société. En classes de terminales, on constate une spécialisation sociale des séries. Sur la période 1985-1995, en terminales scientifiques, la diversification sociale est très modérée tandis que les terminales technologiques se prolétarisent. Considérons les seuls enfants de cadres, leur part, en classe scientifique, passe de 29,2% en 1994-1995 à 34,5% en 1999-2000 : l’embourgeoisement des filières d’élite est manifeste. Le système éducatif doit tendre vers l’élévation générale du niveau de scolarisation tout en poursuivant un rôle qu’il n’a jamais cessé d’exercer : un véritable tri social. Les inégalités dans le système scolaire se manifestent aussi par les profondes disparités existant entre les établissements : le phénomène de ghettoïsation croissant est favorisé à la fois par la course aux bons établissements aux dépends des familles les plus modestes qui n’obtiennent que peu de dérogations, mais aussi par la mise en concurrence des établissements pour l’obtention de moyens supplémentaires et le manque de stabilité des équipes enseignantes dans les zones défavorisées. L’objectif de l’école ne doit pas être de formater des individus pour entrer dans les cases préétablies par la société capitaliste. Même s’il est justifié de lutter contre la politique libérale dont l’école est aujourd’hui une des cibles et qui va dans le sens d’une accentuation des discriminations sociales, on ne peut se contenter d’en rester là. L’institution scolaire est fondamentalement inégalitaire, elle reste un élément essentiel de la domination idéologique de la bourgeoisie. On ne pourra donc pas changer l’école sans changer la société qui l’a produite...

Fanny, [Rouen]

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