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Luttes Lesbiennes, Gays, Bis, Trans et Intersexes : appel de la LCR pour un NPA
dimanche 1er juin 2008, par
Pourquoi des luttes LGBTI ?
L’histoire des LGBTI est une histoire politique, celle de leur oppression et celle de leurs luttes. Il n’y a pas de « nature » homosexuelle ou trans, ni de « gène » de l’homosexualité, mais des catégories historiquement construites et socialement définies, tant au travers des représentations hétérosexuelles et patriarcales dominantes, que des oppositions et à ces formes d’oppression pour les personnes s’écartant de la norme. Plutôt qu’une « nature » clairement définie, c’est une multitude d’identités qui existent, fruits de la contradiction entre poids de l’oppression et possibilités d’émancipation
Dans le sillage de mai 68 et de la révolte de Stonewall en 1969 au États-Unis, une contestation significative de l’ordre hétéro-patriarcal vue le jour, articulant émancipations personnelles et collectives. Le développement de l’État-providence et des solidarités collectives, l’accès à des emplois correctement rémunérés et l’apparition de mouvements de lutte, ont créé les conditions d’une autonomie affective et sexuelle des individu-es, favorisant notamment l’affirmation des gays et des lesbiennes. Dans les années 1980, de l’épidémie de Sida oblige à redéfinir les revendications LGBTI. L’émergence de la question de l’égalité des droits correspond au refus d’être traité comme des sous-citoyens.
Aujourd’hui, quel bilan ? Des droits ont été gagnés et la situation des LGBTI en France a profondément changé depuis que l’homosexualité n’est plus considérée comme « fléau social ». Affirmer son orientation sexuelle est plus simple pour certain-e-s, même si l’hétérosexualité reste la norme dominante et en tant que telle une source de violences et d’oppression. Cependant, cette nouvelle « tolérance » a des contreparties économiques et politiques. Les personnes LGBTI sont devenues un électorat à conquérir ; les partis politiques institutionnels, homophobes aux pouvoirs, les courtisent pendant les campagnes électorales. Elles sont sont aussi conçu-e-s comme une clientèle, ce qui génère une marchandisation excluante et discriminante et uniformise les désirs, les corps et les sexualités.
Les oppressions vécues par les personnes LGBTI sont multiples et diverses. Elles ont toutes cependant pour point commun d’être politiques, de s’appuyer sur des systèmes de domination dont elles sont tout à la fois les conséquences et les instruments. Ces oppressions n’ont rien d’inéluctables. Elles appellent la construction de résistances et de luttes collectives.
Il est urgent et nécessaire de s’atteler à la construction de nouveaux rapports de force pour conquérir de nouveaux droits pour enfin changer ce monde injuste. D’ores et déjà nous proposons cinq pistes d’élaboration et des revendications pour un nouveau parti, parce que la LGBTI-phobie opprime, discrimine et tue.
Un plan d’urgence
1) L’égalité est un principe fondamental.
Le vote du PaCS, en 1999, a constitué une étape dans cette direction, mais [demeure] largement insuffisant. En voulant créer un contrat spécifique, la gauche plurielle a institué l’inégalité dans la loi. C’est le même type de logique avec le contrat civil que Sarkozy prépare. Ce qui est inacceptable pour les gardiens de l’ordre moral, c’est que le mariage ouvre le droit à la filiation !
* Égalité des droits entre homos et hétéros : mariage, filiation, Procréation Médicalement Assistée
* Égalité des droits entre les différents statuts fiscaux : couples mariés, pacsés, concubins ou célibats
Le refus d’autoriser le changement du sexe sur l’état-civil pour les trans, à moins d’avoir subi une chirurgie génitale, est l’instrument d’une vision essentialiste et binaire du genre qui vise à n’accepter les personnes trans que si elles sont stérilisées. Cette même logique, conduit à la négation des personnes intersexes par leur mutilation pour rentrer dans la norme.
* Facilitation du changement d’état-civil(nom et prénom), suppression de la mention de sexe
* Arrêt des mutilations des enfants intersexes. Droit à disposer de son corps et autodétermination
2) L’internationalisme est une nécessité dans un monde LGBTI-phobe.
Être internationaliste c’est refuser les rhétoriques racistes du choc des civilisations. Dans le contexte international de guerre impérialiste et d’opposition idéologique entre « Civilisations », les questions LGBTI se retrouvent parfois bien malgré elles être un enjeu politique, dans lequel certains États se réclamant de valeurs libérales et instrumentalisent hypocritement l’homosexualité comme symbole des valeurs occidentales. Pourtant, l’homophobie n’a ni frontières ni religion favorite : de la Pologne aux États-Unis, de l’Iran au Zimbabwe, les LGBTI et leurs mouvements ne sont bien souvent que les boucs-émissaires de politiques réactionnaires. Être internationaliste c’est penser le soutien avec ceux et celles qui luttent dans leurs pays, c’est combattre les politiques impérialistes de nos États, qui maintiennent une partie de l’humanité dans la pauvreté et la misère et soutiennent les pires dictatures quand leurs intérêts sont en jeu. Pour nous, lutter contre la LGBTI-phobie et construire une véritable solidarité internationale consiste à prendre en compte les situations locales. Il ne s’agit pas d’imposer un modèle d’émancipation « occidental », mais de soutenir les formes de luttes et d’affirmation dans leur diversité. Être internationaliste c’est exiger la liberté de circulation des personnes et lutter contre les politiques racistes d’immigration et d’asile dont le durcissement démagogique privent les LGBTI d’un repli vital en cas de répression.
* Application du droit d’asile pour les personnes victimes de LGBTI-phobie
* Régularisation de tous les sans-papiers, en couple ou célibataires
* Abrogation des lois racistes sur l’immigration et l’asile
3) Le droit à la santé et l’accès aux soins est non-négociable.
L’épidémie du Sida démontre à nouveau combien la santé est une arme au service d’une projet inégalitaire et hétéro-patriarcale.
La santé est une arme géo-politique, elle permet de maintenir des populations entières dans un état de dépendance, et de soumission vis-à-vis des pays dits du « Nord ».
La santé est une arme politique qui fait le tri entre les « bons » et les « mauvais » malades en fonction de critères racistes, sexistes, classistes et LGBTI-phobes. Elle ne leur donne pas le même accès aux soins et à la prévention et révèle combien l’universalisme affiché ne bénéficie en réalité qu’à quelques-uns. Ces politiques inspirées et/ou secondées par les religions jettent l’anathème sur groupes ciblés (trans, toxicomanes, prostitué-e-s, prisonniers) et des populations entières.
La santé est une arme économique, car la logique du profit l’emporte toujours sur la vie des personnes. Cette logique est rendue possible par la propriété privée des brevets médicaux, et induit la privatisation toujours plus grande des services publics de santé.
La santé est une arme hétéro-patriarcale, qui assigne les identités de sexes et de genres, qui pathologise, psychiatrise, généticise ceux et celles qui se retrouvent hors des normes.
* Dépathologisation des trans et accès libre aux traitements médicaux
* Arrêt des mutilations des enfants intersexes et autodétermination
* Santé gratuite pour tous et toutes
* Développement et financement public de la recherche sur la prévention et les traitements
* Production et distribution de médicaments génériques contre le sida à travers l’abolition la propriété privée des brevets médicaux
4) Le droit à disposer de son corps et de son existence est un droit imprescriptible.
Le droit à disposer de son existence, c’est avoir la possibilité de s’assumer en dehors du cadre familial, car cela peut être l’un des premiers vecteurs de l’oppression. Lorsque leur entourage n’accepte pas leur identité et/ou leur sexualité, les individu-e-s sont contraint-e-s à l’enfermement dans la sphère familiale, à l’invisibilité, ou à des situations de précarité parfois dramatiques.
* Droit au logement
* Allocation d’autonomie
* Droit à une protection sociale
Le droit à disposer de son existence, c’est le droit à assumer son identité, à changer de genre et/ou de sexe.
* Dépathologisation des trans.
Le droit à disposer de son existence, c’est lutter contre les oppressions spécifiques des femmes et des lesbienn. Moins payées, plus précaires, plus touchées par le chômages, elles sont soumises à la violence des normes patriarcales, mais aussi à la violences des normes hétérosexuelles qui assujettissent les corps et les vies des femmes aux désirs des hommes.
* A travail égal, salaire égal
* Droit à disposer de son corps et de sa sexualité
Le droit à disposer de son existence suppose de vivre dans une société affranchie des diktats religieux et moralistes.
5) La fin de l’homo-lesbo-trans-bi-intersexo-phobie implique une transformation radicale de la société.
Pour nous, l’homo/lesbo/trans/bi/phobie comporte deux facettes indissociables : c’est aussi la haine des sexualités non hétéronormées, tout un ensemble de violences verbales et/ou physiques que subissent les LGBTI et les personnes considérées comme tel-le-s, car pas assez « viriles » ou pas assez « féminines » ; c’est enfin un outil de la police des genres, servant à maintenir une prétendue frontière naturelle et hiérarchique entre les sexes. Articuler ces deux dimensions, concrètes et symboliques, est essentiel pour mieux combattre LGBTI-phobie, à travers un travail d’éducation et de prévention.
* Mise en œuvre d’une éducation non homo-lesbo-transphobe. Il faut interroger les représentations et les stéréotypes, informer les jeunes en questionnement sur leur identité, mener des actions collectives au sein des établissements scolaires, et plus largement sur les lieux de travail et de vie. Il convient aussi de former les personnels et de dégager les moyens pour le faire.
* Création de structures d’accueil, d’écoute, d’assistance des victimes de l’homo-lesbo-transphobie avec un financement public, incluant la participation des associations LGBTI.
* Application des lois contre les discriminations au travail, en soutenant le travail des syndicats et des associations engagées dans ce combat.
S’organiser pour lutter
Cependant, si ces mesures sont urgentes et nécessaires, elles ne régleront pas en profondeur la question des oppressions que subissent les LGBT. Celles ci trouvent leurs racines dans les structures du système hétéropatriarcal et capitaliste qui se fonde sur des principes inégalitaires : normes de genre, sexisme, violences dans la sphère privée, violence du travail, précarité, destruction des solidarités collectives, marchandisation des existences et des corps, mise en concurrence de tous avec tous... Ce système inégalitaire structure et traverse tous les pans de la société. A l’échelle de l’histoire, la division originelle et inégalitaire de la société entre deux sexes, fondée sur la famille, offre une assise idéologique et socio-économique fondamentale pour le capitalisme. « Homme » et « femme » sont présenté-e-s comme des catégories stables, complémentaires, indépassables … et forcément inégales. Derrière ces fausses évidences qui cachent de profonds préjugés, les normes de genre réduisent la complexité des êtres humains à des catégories binaires et assurent la reproduction des dominations. Cette division sexiste a contribué à justifier l’oppression des formes de vie, de sociabilité et d’érotisme non « hétérosexuels ». Ce sexisme structurel a des conséquences très directes pour les personnes intersexes et trans’ : l’existence des premières est niée, les secondes sont pathologisées,
Remettre en cause implique de l’attaquer de manière globale, en articulant les luttes contre les oppressions et les luttes contre l’exploitation. Notre émancipation exige la destruction du patriarcat et du capitalisme !
Un nouveau parti !
Nous ne devons pas être dépossédés du débats sur nos devenirs. Deux logiques incompatibles s’affrontent : la nôtre qui s’appuient sur l’égalité et l’émancipation ; la leur, celle inégalitaire et criminelle du capitalisme et de l’hétéropatriarcat. Il faut organiser une réponse collective à l’oppression et construire un rapport de force pour faire valoir nos existences et nos revendications, résister à la logique de l’isolement et de la fatalité, et imposer de nouveaux droits et de nouvelles conquêtes politiques. Créer un rapport de force, c’est considérer que nous n’avons pas à être dépossédé du débat sur nos propres existences, c’est commencer à expérimenter avec d’autres le combat pour l’émancipation.
Aujourd’hui, la LCR s’est engagée dans un processus de construction d’un nouveau parti anticapitaliste (NPA).
Pourquoi un nouveau parti ?
Le 6 mai 2007, l’échec de la gauche gouvernementale a laissé le champ libre à la droite la plus réactionnaire et homophobe incarnée par Sarkozy, ami des patrons et des milliardaires. La guerre sociale qu’ils mènent, c’est la violence quotidienne et la répression, la casse des acquis sociaux.
La politique de la gauche gouvernementale est impuissante parce qu’elle accepte la logique du profit, de la concurrence et la remise en cause des services publics. Pour mener son offensive en rafale contre la majorité de la population, Sarkozy a le pouvoir, les patrons ont le MEDEF. Et nous, qu’avons-nous d’efficace pour porter nos aspirations sur le terrain politique ? Qu’avons-nous pour construire les mobilisations capables de remettre en cause la logique du profit ? Comment imposer l’égalité des droits entre homos et hétéros ? Comment refaire du droit à disposer de son existence un droit imprescriptible ? Comment débarrasser la société de l’oppression des LGBTI ?
Nous l’avons vu, ces oppressions sont ancrées en profondeur dans les structures du système hétéropatriarcal et capitaliste. S’attaquer aux racines de ce système inégalitaire nécessite de mener un combat global : seul un parti, une organisation politique regroupant des militants impliqués sur différents terrains de lutte, permet de mener ce combat de manière conséquente.
Aujourd’hui, il manque cruellement un outil qui aide à la convergence des luttes en un mouvement d’ensemble capable de faire reculer le pouvoir et de changer le rapport de force. L’espoir a aussi besoin d’imaginer qu’un autre monde est possible. Nous sommes nombreuses et nombreux à vouloir cet outil : un parti utile aux mobilisations d’aujourd’hui. Un parti pour préparer un changement radical, révolutionnaire de la société c’est-à-dire la fin du capitalisme, de la propriété privée des principaux moyens de production, la fin de l’oppression des femmes et des LGBTI, du pillage de la planète et de la destruction de la nature.
Quelle place pour les LGBTI dans le NPA ?
Un parti anticapitaliste, internationaliste et féministe conséquent doit être porteur des combats contre toutes les oppressions. Mais ce parti ne se substitue évidemment pas aux associations LGBTI : leur mobilisation est essentielle pour construire des revendications, créer des espaces de solidarité, mener les luttes au quotidien ! Ce que nous proposons, c’est un outil collectif et démocratique, qui permette de s’attaquer aux racines des problèmes et des oppressions. Un parti qui n’abandonne aucune lutte, qui soit toujours aux côtés des opprimé-e-s et des exploité-e-s.
Car nous voulons une société capable de satisfaire les besoins sociaux, débarrassée de toutes les formes d’exploitation et d’oppressions de classe, de genre, d’orientation sexuelle, d’âge ou d’origine. Une société où la démocratie ne s’arrête pas au droit de vote et permette à toutes et tous de décider.
Le congrès national de la LCR s’est adressé à toutes celles et tous ceux, individus, militants associatifs, équipes syndicales, courants politiques, qui veulent se regrouper dans un cadre politique organisé, militant, national et démocratique, un parti tissant des liens internationaux avec les forces qui défendent une telle perspective. Ce parti appartiendra à toutes celles et ceux qui s’y engageront. C’est maintenant à celles et ceux qui veulent « prendre parti » de décider ensemble, de construire ensemble !
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