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Emmergence de Die Linke en Allemagne

dimanche 8 juin 2008, par Adrien

La gauche allemande a depuis toujours été dominée par la social-démocratie et son organisation historique, le SPD. C’est un parti qui a toujours entretenu une relation quasi-fusionnelle avec le mouvement syndical, les syndicats lui étant affiliés. La seule période dans l’histoire du mouvement ouvrier allemand où l’hégémonie de la social-démocratie fut contestée sont les années vingt et trente qui ont vu l’émergence, du Parti Communiste Allemand. Mais le nazisme puis la séparation de l’Allemagne en deux ont porté un coup fatal au mouvement communiste et ont consacré de ce fait l’hégémonie incontestable de la social-démocratie. Après la réunification de l’Allemagne en 1990, l’ancien parti unique de l’Allemagne de l’est (RDA) s’est transformé en un parti réformiste et a pris le nom de PDS – Parti du Socialisme Démocratique. Depuis c’est la deuxième voire la première force de gauche dans certains länders de l’Est.

Attaque du SPD contre les salariés

Comme partout dans le monde occidental, le développement de la mondialisation et du néolibéralisme a un impact très fort sur le mouvement ouvrier et la gauche. Le SPD a gagné les élections fédérales de 1998 et a formé un gouvernement d’alliance avec les Verts sous la direction de Gerhard Schröder, le leader de l’aile droite du SPD, une sorte de Strauss-Kahn. En 2003, le SPD réussit à se faire réélire. Cette fois, il annonça une série de réformes néolibérales, appelées Agenda 2010, et qui visaient à précariser les salariés, à imposer des contraintes aux chômeurs, à limiter le pouvoir des syndicats en autorisant les négociations entreprise par entreprise et à augmenter l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans.
En parallèle une politique de gel des salaires et des pensions des retraites a été menée en 2004-2005. À tout ceci il faut rajouter que le contingent allemand en Afghanistan est le deuxième en nombre de soldats, alors que 72 % de l’opinion publique revendique le retrait des troupes allemandes.

Il faut aussi rajouter que bien que dirigée par des gouvernements conservateurs durant les années quatre-vingt, l’Allemagne n’a pas connu l’offensive qu’a pu mener Thatcher en Grande-Bretagne. Cette offensive a dû être menée à partir de 2003 par le SPD. Cela signifie que le mouvement ouvrier et en particulier le mouvement syndical n’ont pas subi la défaite qu’avaient de leurs pairs britanniques ou américains.

Construction d’une nouvelle force à gauche

L’Agenda 2010, la politique en Afghanistan, le retour d’une série de luttes ouvrières et le rôle joué par le SPD ont été à l’origine de l’émergence de Die Linke. Il a été formé en 2007 par deux organisations : le WASG originaire de l’ouest de l’Allemagne et le PDS dans l’Est. La WASG (Alternative Électorale pour la Justice Sociale) a été formé en 2004. Il est principalement composé de membres déçus du SPD, des syndicalistes et des franges intermédiaires des bureaucraties syndicales. Des altermondialistes et quelques révolutionnaires y ont participé aussi. Au moment de la fondation de Die Linke, la WASG comptait 11 000 membres. La figure la plus connue est Oskar Lafontaine, ancien patron du SPD et ancien ministre des finances. De l’autre côté, le PDS, dirigé par Gregor Gÿsi, a apporté 59 000 membres, notamment des élus au niveau local et des groupes parlementaires dans les parlements des Länder et le parlement fédéral. La création de Die Linke s’est appuyée sur le score réalisé par les deux formations dans les élections fédérales de 2005, de l’ordre de 8,7 % (où Schröder a perdu et le SPD a dû former un gouvernement de coalition avec la droite). 4 000 personnes ont adhéré à Die Linke dans les deux semaines suivant sa création et ses groupes étudiants sont passés de 8 à 36 en quatre mois.

Le PDS représente l’aile droite de ce parti et participe au gouvernement régional de Berlin avec le SPD. Sa stratégie est d’utiliser son poids électoral pour s’insérer dans des coalitions électorales avec le SPD. La WASG représente donc l’aile gauche du nouveau parti. Sa stratégie consiste à obliger le SPD à revenir sur ses positions réformistes des années soixante-dix afin de passer des accords de gouvernement avec lui. Des désaccords existent au sein des deux pôles sur la question de l’Afghanistan, les positions les plus droitières étant celles du PDS.

Tous les révolutionnaires allemands ne participent pas à Die Linke. Certains analysent son émergence comme comblant le vide laissé par la droitisation du SPD. De ce point de vue, ils l’analysent comme un parti social-démocrate traditionnel, lié aux bureaucraties syndicales et ne contribuant pas à la dynamique de la lutte des classes. Pour d’autres, son émergence repose sur le développement de la dynamique de la lutte des classes, et la direction qu’il prendra dans les années à venir dépend de la lutte politique qui se mènera en son sein. De ce point de vue, ils en tirent comme conclusion que le rôle des révolutionnaires est de mener cette bataille pour faire que Die Linke se mette sur les rails de l’anticapitalisme.

Christakis, [Censier]

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