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Grève des travailleurs sans-papiers

Interview sur le chantier rue Xaintrailles (Paris 13eme)

dimanche 8 juin 2008, par Adrien

Bakari travaille sur le chantier de la Cogedim situé rue Xaintrailles, dans le 13e arrondissement de Paris. Avec 28 de ses camarades, et soutenus par la CGT, ils se sont mis en grève le 15 avril, pour lutter contre la situation d’hypocrisie et d’exploitation qu’ils subissent tous les jours. Depuis lors, ils occupent leur chantier, déterminés à rester jusqu’à ce qu’ils soient tous régularisés.

RED : Bakari, peux-tu nous raconter ton arrivée en France ?

Bakari : Je suis arrivé une première fois en 2003, puis je suis parti en Italie. Je suis revenu définitivement en 2005, et depuis 2005, je travaille ici. Je travaille sous le nom de quelqu’un d’autre, avec la pièce d’identité de quelqu’un d’autre. En fait le patron le sait très bien. Au bout de deux ou trois jours, il m’a dit : « je sais que le nom que tu m’as donné n’est pas ton nom. Je te reconnais tu es le frère de telle personne. » Je lui ai dit : « eh bien oui ». Je m’attendais à être viré, mais ça continue comme ça au bout de deux ans, avec des contrats de travail renouvelable tous les 3 mois, et je paye mes impôts.

RED : Parle-nous de tes conditions de travail.

Bakari : Je travaille pour la Cogedim, je fais de la démolition. Les conditions de W sont terribles. Il n’y a pas de sécurité, il n’y a rien. On travaille comme des cons. Sur le contrat ils mettent 35 heures mais tu fais 40 heures par semaines. Souvent tu fais même 45 heures, tu travailles le samedi. Le patron préfère employer des ouvriers sans-papiers, car il sait qu’il peut nous exploiter comme ça.

RED : Comment a débuté ce mouvement de grève ?

Bakari : On s’est tous retrouvés entre nous, parce qu’on connaît les situations les uns des autres. On est allé voir les syndicats, on était syndiqués, tous, à la CGT. On leur a expliqué le cas, et d’autres sans-papiers étaient déjà allés les voir pour leur expliquer le même cas. C’est eux qui ont organisé la grève : un dimanche on nous a convoqués, tous, et on nous a dit que si on voulait vraiment se mettre en grève, ils étaient prêts à nous aider. C’était à nous de se mettre en grève, pas à eux. Le mardi suivant, le 15, on commençait la grève.

RED : Vous avez l’air déterminés.

Bakari : La grève continue parce qu’on tient encore, et là il faut attendre, il faut être patient, il ne faut pas lâcher. Il y en a déjà neuf qui ont été convoqués, ils ont été régularisés. Mais on attend encore. On est là jusqu’au bout, jusqu’à ce que tout le monde soit régularisé. S’il n’y avait pas de soutiens, je ne pense pas qu’on aurait tenu aussi longtemps, ça fait 45 jours qu’on est là. On a le soutien des gens du quartier, qui ne sont pas syndicalistes, et aussi de gens qui ne sont pas du quartier.

Propos recueillis par Jules, [Tolbiac]

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