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Venezuela : un processus contradictoire

vendredi 12 janvier 2007, par JCR-RED

Le processus bolivarien qui secoue le Venezuela et plus largement toute l’amérique latine pose de nombreuses questions pour les révolutionnaires du monde entier. Chavez est arrivé au pouvoir en 1998 aux élections présidentielles. Depuis, par trois fois (coup d’état avec l’aide de la CIA, lock-out patronal, referendum révocatoire) l’oligarchie vénézuélienne a tenté de le renverser et à chaque fois c’est la mobilisation spontanée des masses qui lui a permit de rester au pouvoir. A chaque fois, les liens entre Chavez et son peuple se sont resserés obligeant celui-ci à radicaliser son discours. Sur le plan international, Chavez se place aujourd’hui comme le leader du front anti impérialisme US. Il avance la nécessité du « socialisme du 21ème siècle ».

Progrès social et limites du processus

Le venezuela est un pays qui dispose des plus importantes ressources pétrolières de la planète. L’industrie pétrolière est nationalisée depuis 1958 mais, avant Chavez, on estime que 80% de l’argent du pétrole était détourné par la corruption. En épurant l’industrie du pétrole (12 000 hauts fonctionnaires du pétrole licenciés après le lock-out), Chavez a permis la redistribution de cette manne pour la mise en place de « missions » (médecins cubains, éducation, alimentation à bas prix...), le développement d’infrastructures, la mise en place de coopératives...
Systématiqement, la mise en place des missions est conditionnée par l’autoorganisation à la base. C’est les communautés qui définissent leurs besoins, en font la demande et qui les font vivre au quotidien. Le progrès social est réel et vécu comme tel à la base, ce qui explique en partie le large soutien à Chavez.

Mais, dans les faits, bien des exigences populaires ne sont pas satisfaites. La corruption et la bureaucratie érritées de l’ancien régime reste et freine le processus. L’argent disparait toujours entre les ministères et les projets dans les quartiers. L’appareil d’état est toujours dans les mains de la bourgeoisie.

Sur le plan économique, il n’y a pas de réelles incursions dans le grand capital. Le mode cogestionnaire mis en avant reste confronté à la concurrence dans le cadre d’une économie de marché et peut être source de désillusion pour les travailleurs. Les entreprises en co-gestions (Etat-salariés) sont des exemples rares issus de mois de grèves des travailleurs qui ont abouti au rachat par l’état de l’usine en faillite au prix fort. A aucun moment il n’y a expropriation. Quant à la réforme agraire, elle n’a toujours pas eu lieu. Les paysans ont le droit d’occuper les terres non cultivées. Mais lorsqu’ils mettent la loi en application, les grands propriétaires terriens leurs tirent dessus (2000 assassinats en 3 ans de leaders paysans) en toute impunité.

Chavez et l’avant garde

Le processus bolivarien n’est pas une révolution au sens strict du terme (l’appareil d’état est le même, le système économique aussi) mais, le discours de Chavez et l’écho qu’il obtient auprès des masses créent les conditions de l’émergence d’une avant-garde révolutionnaire. Chavez insite sur l’auto-organisation, dénonce la corruption et la bureaucratisation, explique que c’est au peuple organisé de faire la révolution. Cette contradiction entre le discours révolutionnaire de Chavez et les politiques misent en place permettent de poser la nécessité du dépassement du chavisme lui-même.

Au niveau des salariés (20% de la population) la création de la centrale syndicale UNT (Union nationale des travailleurs) qui regroupe plus d’un million de salariés est une avancée significative. Cette centrale prend des positions classistes d’indépendance au chavisme et à la bourgeoisie. C’est un grans pas vers l’autonomie des travailleurs. Les paysans se posent la question de prendre les armes pour organiser leur auto-défense. La question du pouvoir au peuple et d’un programme révolutionnaires (projet Nuestra America) commence à se poser largement dans les barrios (quartier pauvres).

Dans tous ces secteurs, le mécontentement face à la lenteur du processus grandit. Jusqu’en Décembre de cette année, tout le monde va appuyer la réélection de Chavez. C’est ensuite que tout se jouera. Soit le processus s’arrète et la réaction reprend le dessus (par la force ou plus surement par le dégénérescence du chavisme), soit le peuple trouve les moyens de dépasser le chavisme et de franchir une nouvelle étape vers le socialisme. Pour cela, la nécessité de construire un parti révolutionnaire capable de disputer la direction du processus au chavisme se pose et n’est pas résolue.

Sylvain, [Toulouse]

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