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Le Code du travail au coeur de la bataille entre patrons et travailleurs

mercredi 26 septembre 2007, par RED

Le MEDEF réclame aujourd’hui
la mise en place d’un Contrat
Unique de Travail, qui remplacerait
le CDD et le CDI. En plus de faire disparaître
le CDI au profit de CDD de durées variées, il
s’agit de faire en sorte que patrons et salariés
puissent se « séparer à l’amiable », comme
pour un divorce... En clair : la liberté pour
les patrons de licencier à tout moment sans
motif n’importe quel salarié, au mépris des
garanties qu’offre actuellement le code du
travail ! D’où vient le code du travail et pourquoi
est-il aujourd’hui la cible d’attaques
comme le contrat Unique ?

La lutte pour la reconnaissance des droits des travailleurs

Suite à la Révolution française, la bourgeoisie
qui prend le pouvoir interdit toute
association entre patrons ou entre travailleurs,
avec la Loi Le Chapelier (1793)
 : la révolution ne reconnaît pas l’existence
de classes, elle ne reconnaît que des
citoyens, qui sont libres et égaux... Donc
l’Etat doit intervenir le moins possible, y
compris dans les rapports entre patrons
et travailleurs, supposés égaux eux aussi.
C’est l’affirmation d’une « complète liberté »...
c’est-à-dire d’une absence de droits pour
les travailleurs. Les relations patrons/salariés
sont régulées à partir de 1804 (sous
Napoléon) par le code civil : il y est précisé
dans un article repris de l’ancien régime
que les salariés ne peuvent être engagés
que pendant un temps limité (pas de CDI
 !) et qu’en cas de litiges, c’est le « maître »
qui est cru sur parole ! Cette dernière disposition
ne sera abolie qu’en 1868.

Le code du travail, produit de luttes de classes

Le début du 19ème siècle est la période
de naissance du capitalisme en France, et
celle où les travailleurs doivent se battre
pour leur simple survie. La classe ouvrière
impose cependant son droit à l’existence.
Elle obtient les premières lois et mesures
favorables à la condition ouvrière : interdiction
du travail des enfants de moins de
8 ans en 1841, le droit de coalition et de
grève sont reconnus en 1864, la journée
de 10 h en 1900... Et la création du code
du travail en 1910 reconnaît la nécessité
de droits spécifiques pour les travailleurs
 : c’est une reconnaissance de l’existence
de la classe ouvrière et de ses droits. La
reconnaissance de ces droits dans le code
du travail est liée aux avancées et reculs
de la lutte de classes. Les conventions
collectives (les mêmes droits collectifs
des travailleurs dans une même branche
d’activité), les 40h et les 15 jours de congés
payés sont gagnés en 36 grâce à la grève
générale et aux occupations d’usine...

Acquis détruits par Vichy, puis rétablis et
renforcés aux lendemains de la deuxième
guerre mondiale suite à de féroces luttes.
Les évolutions du rapport de forces se
reflètent dans le code du travail. Chaque
victoire ou défaite, même locale, fait jurisprudence
et acquiert donc force de loi. Les
avancées du code du travail sont aussi le
produit de luttes locales, parfois obcures
mais victorieuses gràce à l’acharnement de
quelques militants ouvriers.

La défense du code du travail et la lutte pour une autre société

Le code du travail est
cependant une institution
liée à la société capitaliste,
au pouvoir qu’y détient la
classe capitaliste. Il consacre
le droit de propriété :
les patrons sont reconnus
comme les propriétaires
des entreprises, des usines,
des bureaux... C’est à
eux que revient le dernier mot, le pouvoir
de décision dans l’entreprise. Respecter à
100% le code du travail reviendrait à accepter
que ce soient les patrons qui aient le
pouvoir de décision dans les entreprises
et dans la société... et accepter les reculs
qu’a imposés le patronat ces 30 dernières
années : depuis la fin des années 70, le
patronat et les gouvernements successifs
ont entamé un travail de sape du code
du travail (la multiplication des contrats
précaires, la plus grande facilité à licencier
pour des motifs économiques...).

Aujourd’hui, le code du travail et tous les
droits des salariés subissent de brutales
attaques. Le patronat rève d’un marché du
travail totalement dérégulé où des salariés
sans droits seraient embauchés à la journée
comme au 19ème siècle...

La défense du code du travail est un
point d’appui fondamental dans les luttes
quotidiennes et ce n’est pas un hasard si le
patronat veut le réduire quasiment à néant.
Mais nous devons également proposer des
perspectives de luttes qui dépassent la
seule défense des intérêts des salariés
dans le cadre de cette société. La bataille
pour l’interdiction des licenciements, pour
la levée du secret industriel et commercial,
le contrôle des salariés sur la production
sont des nécessités qui se heurtent à la
légalité. A l’image des travailleurs argentins
de Zanon, Brukman... qui ont pris
le contrôle de leurs entreprises [1] et qui
prouvent que les travailleurs peuvent faire
tourner l’économie, nous ne devons pas
avoir peur de remettre en cause la propriété
et les lois qui la défendent.

Bébert, [Nanterre]


Cet article est largement inspiré de Les attaques
contre le Code du Travail au coeur de l’offensive
du patronat et du gouvernement contre les
salarié·e·s de Denis Seillat et Gérard Villa (paru
dans Débat Militant, octobre 2005)


[1Voir le film The Take de A. Lewis et N. Klein

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