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Le colonialisme et les responsabilités du mouvement ouvrier
dimanche 21 octobre 2007, par
Si les luttes sont à l’origine des acquis des travailleurs du Nord, il n’en demeure pas moins que les quelques miettes qui ont été arrachées aux capitalistes au Nord, n’ont pu l’être que grâce à ce que la bourgeoisie pouvait concéder, du fait de son enrichissement par le pillage du Sud. « L’impérialisme crée la possibilité économique de corrompre les couches supérieures du prolétariat  »disait Marx. En d’autres termes, la misère du Sud a « profité  » à une partie des miséreux du Nord.
Pendant que la bourgeoisie exploitait, tuait, torturait, la classe ouvrière du Nord restait silencieuse, au mieux. Et en définitive, ce furent les peuples du Sud qui offrirent et qui offrent encore la seule résistance sérieuse au colonialisme ou à l’impérialisme. Comme le disait les troskistes d’avant guerre : « tout peuple qui en opprime un autre ne saurait être libre ! »
Il faut reconnaître la spécificité de la traite des Noirs, et opérer le procés de l’apathie ; au mieux ; de la collaboration et de l’adhésion plus souvent encore, des peuples du Nord.
Engels écrivait Kautsky en 1882 : « Vous me demandez ce que les ouvriers anglais pensent de la politique coloniale. Ma foi, la même chose que ce qu’ils pensent de la politique en général : ce qu’en pensent les bourgeois. Les ouvriers profitent tranquillement avec eux du monopole colonial de l’Angleterre et de son monopole sur le marché mondial »
Un journaliste anglais bourgeois nommé Stead, en 1895, raconte : « J’étais hier dans l’East End ( un quartier populaire de Londres ), et j’ai assisté à un réunion de sans travail. J’y ai entendu des discours forcenés. Ce n’était qu’un cri : Du pain ! Du pain ! Revivant toute la scène en rentrant chez moi, je me sentis encore plus convaincu qu’avant de l’importance de l’impérialisme... (...) pour sauver les 40 millions d’habitants du Royaume Uni d’une guerre civile meurtrière, nous, les colonisateurs, devons conquérir des terres nouvelles afin d’y installer l’éxcédent de notre population, d’y trouver de nouveaux débouchés pour les produits de nos fabriques et de nos mines. »
Si les luttes sont à l’origine des acquis des travailleurs du Nord, il n’en demeure pas moins que les quelques miettes qui ont été arrachées aux capitalistes au Nord, n’ont pu l’être que grâce à ce que la bourgeoisie pouvait concéder, du fait de son enrichissement par le pillage du Sud. « L’impérialisme crée la possibilité économique de corrompre les couches supérieures du prolétariat »disait Marx. En d’autres termes, la misère du Sud a « profité » à une partie des miséreux du Nord.
« Les profits élevés que tirent du monopole les capitalistes d’une barnche d’industrie parmi beaucoup d’autres, d’un pays parmi beaucoup d’autres, etc... leur donnent la possibilité économique de corrompre certaines couches d’ouvriers, et même momentanément une minorité assez importante, en les gagnant à la cause de la bourgeoisie (...) »
« C’est par l’esclavage des centaines de millions d’habitants de l’Asie et de l’Afrique que l’impérialisme britannique a réussi à maintenir, malgré ses charges, le prlétariat britannique sous domination bourgeoise. La plus-value obtenue par l’exploitation des colonies, est un ds appuis du capitalisme moderne. Aussi longtemps que cette source de bénéfices ne sera pas supprimée, il sera difficile à la classe ouvrière de vaincre le capitalisme. »
Au cours de la guerre mondiale, la 4e Internationale évoquait cette corruption à un moment difficile pour le prolétariat européen : « Préoccupées avant tout de leur sort immédiat, les masses ne s’attachent guère au contenue impérialiste fondamental du programme des différents clans bourgeois. Elles tendraient même à faire leurs les préoccupations impérialistes dans la mesure où l’importation des denrées coloniales leur paraît susceptible d’apporter une solution au problème du ravitaillement. »
Un sentiment de « rancune » ?
Il ne s’agit pas de dénoncer une « responsabilité collective », il s’agit de comprendre ce que fut la colonisation, comment elle marqua le développement du capitalisme, comment elle détermina l’état du monde dans lequel nous vivons. Il s’agit aussi de comprendre que les séquelles de cette période ne s’arrêtent pas là. Des siècles d’oppression ne se gomment pas par la simple affirmation de bonne volonté des militants anti-impérialistes du Nord.
« L’opposition séculaire des petites nations et des colonies par les puissances impérialistes a fait naître, chez les masses laborieuses des pays opprimés, non seulement un sentiment de rancune envers les nations qui oppriment en général, mais encore un sentiment de défiance à l’égard du prolétariat des pays oppresseurs. L’infâme trahison (...) [ de la 2e Internationale ] n’a pu qu’accroître cette défiance bien légitime. Ces préjugés ne pouvant disparaître qu’après la disparition du capitalisme et de l’impérialisme, dans les pays avancés, et aprés la transformation radicale de la vie économique des pays arriérés, leur extinction ne peut qu’être lente. »
Cette notion, Lénine en fera un point central des thèses qu’il rédigera pour le congrés de l’Internationale communiste. Des siècles d’ahésion au colonialisme ne s’oublient pas. On ne supprime pas les têtes coupées, les viols, les guerres et les massacres par des intentions de bonne volonté. Parce que cela aura marqué la conscience des peuples opprimés, mais aussi à l’inverse, la conscience des travailleurs du Nord.
« Le peuple français (...) paie lui-même l’oppression dans laquelle il permet à ses capitalistes de maintenir les peuples coloniaux d’Afrique et d’Asie. Tant que le prolétariat français ne conduira pas le peuple dans la voie socialiste, en rejetant dans les paroles et dans les actes, l’exploitation d’esclaves coloniaux par l’impérialisme français, ni les humiliations, ni les souffrances, ni les déceptions ne lui seront épargnées. »
L’idéologie coloniale, le racisme sont des illustrations de cette profonde impression des consciences. Pour les révolutionnaires, la question n’est donc pas de nier la cassure, mais de la comprendre pour la surmonter. Malcom X défendait à la fin de sa vie, une unité des Noirs pour combattre.
« Pour la première fois de notre histoire, nous avons le désir de nous rapprocher. Pour la première fois de notre histoire, nous avons le désir de travailler ensemble. Et à ce jour, pas une seule organisation n’a tenté de nous unir à nosfrères et à nos soeurs de la terre de nos ancêtres. Marcus Garvey a bien essayé, le gouvernement l’a rejeté en prison mais il a essayé. La seule chose qu’ils craignent, c’est qu’une fois que nous serons unis, nous nous unissions avec nos frères et nos soeurs de là bas. Ce la a effrayé plus d’un homme de pouvoir. Beaucoup de gens tiennent ici à ce que nous restions une minorité, ils redoutent notre militantisme et sont par conséquent vigoureusement opposés au succès d’un quelconque regroupement des diverses factions dans une organisation susceptible d’embrasser une vision et une pensée internationaliste. Une organisation dont l’idéologie, les espoirs et les aspirations pourraient être mondiaux plutôt que limités à l’intérieur des frontières ou des paus voisins des Etats Unis. »
Mais si l’étude et le procès de la traite a commencée chez les Noirs américains de l’autre côté de l’Atlantique, simplement parce que le problème a été posé depuis plusieurs dizaines d’années par les marxistes américains Noirs, le mouvement des droits civiques, Malcom X etc.., il n’en va pas de même sur les continents africains et européens. Ni les travailleurs, ni le mouvement ouvrier organisé n’a tiré les leçons de cette période, en en prenant la mesure, en estimant les séquelles laissées sur la conscience des travailleurs, et la distinction en fonction du lieu où elle a pris naissance.
Les nations qui ont organisé l’esclavage n’ont pas connu de bilan de la période. L’esclavage français a été le plus long de tous, et il s’est prolongé par le travail forcé dans les colonies. Mais les petits enfants français n’étudient pas cette période....
Pour longtemps, les blancs seront porteurs de cette histoire, leur naissance les rattachera à cette barbarie, pour les peuples du Sud. Racisme diront certains ? Le racisme seriat d’expliquer qu’il y a un déterminisme qui fait du Blanc un oppresseur, du Noir, un opprimé. La clairvoyance est de combattre cette image issue de la période coloniale et entretenue par la classe dominante impérialiste d’aujourd’hui.
Personne n’est à l’abri de cette idéologie tant elle a façonnée les sociétés dans lesquels nous sommes nés, que nous soyons noirs ou blancs. « L’ensemble des rapports de production constitue la structure économique de la société, la base concrète sur laquelle s’élève une superstructure juridique et politique à laquelle correspondent des formes de consciences sociales déterminées. Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et intellectuelle en général. Ce n’est pas la conscience des êtres qui détermine leur être, c’est inversement leur être social qui détermine leur conscience. »
A partir du moment où la construction des rapports de production a connu une base géographique, la question de l’appartenance d’un individu à un continent ou à un autre, joue un rôle déterminant sur sa conscience.
Il serait aussi stupide de s’en prétendre exempt que de s’auto décréter à l’abri de l’oppression de la femme dans la société occidentale.
Ce texte est extrait du site internet UCI ( Unité contre l’impérialisme ) et constitue un chapitre consacré à la responsabilité du mouvement ouvrier dans le développement du colonialisme. Les rédacteurs du site ( aujourd’hui inaccessible sur la Toile ) s’étaient regroupés au sein du CIO ( Comité pour une Internationale Ouvrière ). Une grande parte des militants du CIO ont aujourd’hui rejoint la LCR.